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Place au « vrai » Rachid Badouri
16 septembre 2019
Stéphanie Vallet / La Presse

Place au « vrai » Rachid Badouri

Parti présenter Badouri rechargé en France à l’automne 2016, Rachid Badouri s’est fait plutôt discret au Québec. De retour à Montréal depuis quelques semaines, l’humoriste amorce jeudi prochain à Laval le rodage de son troisième spectacle. Une production sans steppettes ni artifices, à l’image du nouveau départ entrepris par Rachid Badouri, qui a fait un grand ménage dans sa vie.

À 42 ans, Rachid Badouri a décidé de tout envoyer balader pour se convertir à la simplicité. Une décision mûrement réfléchie qui s’est imposée après une crise de la quarantaine frontale et des épreuves qui lui ont été envoyées par la vie : en quelques mois à peine, Rachid a été frappé par une virulente bactérie, a vu s’effondrer la boîte de production de ses spectacles (Juste pour rire) et s’est séparé de son agent et ami de toujours, Steve Rasier, qui nage en plein scandale.

« La quarantaine a frappé très, très fort. Je pensais que ça se réglait en achetant un convertible, en mettant des casquettes de yo et en me disant que tout allait bien aller. La vie te parle, t’annonce une tempête. Si tu es capable de lire entre les lignes, elle va t’être bénéfique pour la seconde moitié de ton existence. Mais si tu joues au dur, que tu ne l’acceptes pas, tu vas prendre le virage du has-been et de la dépression », confie Rachid Badouri.

En octobre 2017, alors qu’il a encore 30 représentations de Badouri rechargé à son agenda en Europe, l’humoriste doit se résigner à tout annuler. « J’étais épuisé et j’avais mal aux jambes. J’avais des taches rouges sur les pieds. En faisant des tests, on s’est rendu compte que c’était une cellulite, une bactérie virulente de la famille de la bactérie mangeuse de chair. »

Au repos forcé, Rachid a été le témoin impuissant de la chute de l’empire Juste pour rire, puis du scandale médiatique qui touche son agent des 13 dernières années, Steve Rasier, pasteur et bras droit du dirigeant de la controversée Église montréalaise Parole qui libère, accusé d’avoir soutiré d’importantes sommes à d’ex-fidèles à des fins personnelles.

« Ç’a été une des épreuves les plus douloureuses de ma vie. Dans nos têtes, on finissait notre vie ensemble ! Il m’a laissé par amour. Il ne pouvait pas m’emmener là où il allait. Il voulait défendre sa vérité. C’est le gars le plus honnête que je connaisse, malgré tout ce qu’on a pu dire. Je ne nie surtout pas les témoignages des gens touchés, mais, à cause d’un reportage dans les médias, j’ai dû choisir entre mon agent et mon ami », précise Rachid Badouri, qui a poursuivi sa carrière sans celui qu’il considère autant comme un frère que comme une béquille pour avancer dans sa vie professionnelle.

« Quand la poussière est retombée, j’ai réalisé que c’était ça qu’il me fallait aussi. Steve était mon 911. Mais ça ne m’aidait pas. »

PHOTO FOURNIE PAR ALLIANCE
Rachid Badouri et Guy A. Lepage dans L’appât

L’humoriste a également quitté Juste pour rire après la vente du groupe. Courtisé par de nouveaux agents et producteurs, l’humoriste a finalement rejoint KO Scène, la boîte de Louis Morissette, que son ancienne productrice, Véronique Trépanier, a elle aussi choisi d’intégrer.

En quête du « vrai » Rachid

Résolu à monter sur scène pour présenter le « vrai Rachid » dans son nouveau spectacle, Rachid Badouri se posait des questions existentielles depuis un bon moment déjà et a décidé de consulter un coach de vie après son deuxième spectacle.

« Le succès a été tellement rapide. Un jour, un coach de vie m’a sorti une affiche de moi en pleine séance et m’a dit : “Ce gars-là est rendu trop big pour ce que tu es, il va te faire du mal. Tu ne pourras pas le suivre” », se souvient-il. Décidé à travailler sur lui-même en pleine crise de la quarantaine, l’humoriste a également consulté un psy en France.

« Il m’a dit : “Arrêtez de me parler du nouveau Rachid. C’est biologiquement impossible. Vous êtes le vrai Rachid, celui qui était caché par plusieurs façades.” C’était une révélation en soi d’entendre ça. »

« Avec l’âge et l’expérience, on se rend compte que le métier d’humoriste est ce qui se rapproche le plus de ce que l’humain est, poursuit-il. Tu peux partager tout ce que tu vis en faisant rire. Les comédiens de théâtre sont prisonniers de leurs textes. Moi, j’avais un plateau d’argent pour parler de ce que je vis, mais, pendant des années, j’ai montré une façade qui est un peu plus facile. Je ne le regrette pas, j’ai fait passer du bon temps aux gens, mais là, je suis rendu ailleurs dans ma vie. »

« J’étais insupportable »

Tout sourire sur scène, l’humoriste montrait une tout autre facette de sa personnalité quand les projecteurs s’éteignaient. De quoi lui tailler une réputation de diva dans le milieu de l’humour.

« Je me suis permis de faire des choses inacceptables. J’ai déjà crié après ma relationniste de presse et elle m’a remis à ma place en me disant qu’elle n’était pas payée assez cher pour supporter ça, se rappelle Rachid. En 2010, je tournais dans un film, mon show roulait, j’avais tout ce dont je pouvais rêver, mais j’étais insupportable. »

Il évoque un épisode où son micro-cravate n’a pas fonctionné pendant un tournage devant public de son émission Peut contenir des Rachid. « J’enlève le micro en le jetant sur scène et je m’en vais péter une crise de diva dans ma loge, en critiquant le travail des techniciens. Tout le monde essaie de me calmer. Le problème, c’est que mon second micro était encore allumé… Tout le monde m’avait entendu. »

« Ça m’a donné une bonne leçon et j’ai vite compris que j’allais passer de l’humoriste de l’année à l’humoriste de marde si je continuais comme ça. »

Lors d’un lancement de programmation de Juste pour rire aux côtés de Lise Dion, l’humoriste trouve cette dernière plutôt froide à son endroit. « Je suis allé la voir pour lui demander si elle avait quelque chose contre moi. Elle m’a répondu : “Contre toi, non, contre ton attitude, oui ! Ça fait 10 fois que je te croise sur des plateaux et que tu as des demandes particulières, que tu n’es pas content de ci ou de ça. J’ai l’impression que tu n’aimes pas ta job. Sais-tu combien de gens aimeraient faire ce que tu fais ?” Elle lisait en moi comme si j’étais transparent. Elle m’avait réveillé ! », lance Rachid Badouri.

Rachid veut (encore) faire son cinéma

Si les prochains mois seront déterminants dans la carrière d’humoriste de Rachid Badouri, il compte également poursuivre le développement de celle d’acteur avec le soutien de Louis Morissette. « C’est un de mes défis, explique le producteur de KO. Je l’ai vu auditionner récemment et l’humilité qui l’habite désormais en fait un acteur différent et il est bon. Je produis une série en ce moment avec Ricardo Trogi. Je lui ai dit que j’aimerais qu’il voie Rachid. Il n’était pas sûr. Il l’a vu et il a eu le rôle. Mais ça ne rentre pas dans les dates de tournée et de rodage. »

Ravi de cette nouvelle aventure aux côtés de Louis Morissette, Rachid Badouri n’a en effet pas dit son dernier mot en tant qu’acteur. « Je ne lâcherai jamais. Parfois l’attente est longue et décevante, mais j’ai la chance de travailler sur scène pendant ce temps-là », souligne-t-il.

 

Source :

Stéphanie Vallet / La Presse
https://www.lapresse.ca/arts/humour/201906/10/01-5229522-place-au-vrai-rachid-badouri.php

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